JULIE BRUNET
The way of Life
La voie de la responsabilité







Pour nous Cheyennes, les chevaux font partie de notre mode de vie. Ils nous apprennent qui nous sommes, à déchiffrer le fonctionnement de la nature et savoir comment interagir avec elle.
Mon peuple vivait dans la nature. Ils chassaient pour survivre. Pour ce faire, ils observaient les nations des animaux afin de comprendre la meilleure façon de les respecter. C'est ainsi qu'ils vivaient, de sorte qu’il y ait un lendemain pour leurs enfants. Pour pouvoir monter les chevaux sauvages, ils devaient aussi interpréter leurs codes, leur langage. Ils étudiaient la manière dont les chevaux interagissaient avec leur environnement et comment ils communiquaient entre eux. Les chevaux mettent du temps à s'approcher. Il faut juste les toucher des yeux, pas de la main, car ils ont dans leurs gènes « l'instinct de fuite ».
La nation du cheval communique à travers des émotions, des mouvements, des expressions. Au sein du troupeau, le cheval qui a le plus d'expérience et le plus d’énergie charismatique est le leader. Il est chargé de mettre les siens hors de danger, lorsqu'un message de menace est apporté au sein de la horde. C'est ce que doit être le horseman: une référence pour les chevaux. Il en est responsable et doit pouvoir réagir en toute maîtrise en cas de danger.




Monter à cheval implique un changement dans la position naturelle du cheval. Par conséquent, il faut établir une connexion spirituelle avec lui ou elle. Une connexion qui implique la relation hiérarchique, qui vient du « bagage » génétique du cheval. Le langage du cheval est relativement simple : quand la tête est très haute, c'est un signe de fierté et de domination. Lorsqu’elle est baissée et le maxillaire détendu, cela signifie que le cheval n'est pas prêt à se battre. On communique avec un cheval en se déplaçant dans l'espace et jouant de son énergie charismatique. Le cheval comprend la posture et l'énergie. Si je veux m'imposer, je mets mon énergie dans mes yeux. Si je veux que le cheval se sente à l'aise pour me suivre, je mets mon expression charismatique de côté et je donne l'épaule. Ensuite, il ou elle me suivra, exactement comme la horde suit son chef.
C'est assez simple de comprendre comment fonctionnent les chevaux, mais ce n'est pas simple d'être dans la bonne condition pour s’assurer que notre posture génère les bonnes informations. Si on ne fait pas attention, nous pouvons amener nos problèmes. Si l’on entre dans le roudpen avec de la frustration, de la colère ou toute autre émotion humaine, le cheval le ressent immédiatement et se sent mal dans sa peau. Alors nous ne sommes plus d’aucune aide pour lui ou elle, seulement un problème de plus. Et un cheval sauvage a des problèmes. Surtout quand on essaie d'essayer de s'approcher, car avant, il ou elle était libre. Les chevaux nous apprennent donc qui nous sommes et comment nous améliorer.



Ceci ne concerne pas uniquement les chevaux sauvages, mais aussi les chevaux de sang-froid car ils partagent le même patrimoine génétique : ils réagissent avec le même instinct, mais leur expérience diffère. En entrant dans le roundpen, la qualité de l'énergie est primordiale. On entre avec le sens des responsabilités, on doit par conséquent contrôler son esprit et son corps. Quand j'étais jeune, j'avais l'habitude de casser des chevaux en Europe, mais quand j'ai demandé à monter à cheval aux États-Unis, mon oncle m'a répondu : « Peut-être un jour. Pour l'instant, aide-moi avec la hutte à sudation ». J'ai dû l'aider à préparer les cérémonies et à porter les pierres rouges de feu. En fait, il me préparait à la manière cheyenne. Mais j'ai grandi en Europe et je ne le comprenais pas à l'époque.
Les cérémonies et les rituels, comme la Danse du soleil ou le jeûne, vous apprennent à vous contrôler. Ils enseignent à votre esprit à être plus puissant que votre corps et votre mental. Le corps a besoin de confort tout le temps, donc il met dans le mental cette idée de confort. Le sacrifice dans les cérémonies vous permet de comprendre qu'il n'y a pas besoin de confort, ni de contrôle de la part du mental. Le corps et le mental travaillent ensemble, mais seul l'esprit les relie et se connecte aux autres.



En Europe, les gens sont intellectuels. En donnant le contrôle à leur mental, ils ont perdu le lien avec tout, humain, non-humain. Ils ne peuvent plus ressentir avec leur cœur. Cependant, le cœur est le pouvoir d'expression de l'esprit. Les chevaux sont des esprits individuels et ont leur propre personnalité. C'est un non-sens de construire une méthode. Les méthodes ne se trouvent que dans les cultures intellectuelles. La manière des horsemen est de sentir le cheval avec le cœur, la technique vient de l'amour. Il faut penser cheval et faire partie de son univers. C'est ce que nous enseignent nos frères et sœurs de la Nation du cheval : comment comprendre la nature et comment en faire partie.
J'enseigne le horsemanship en Europe car c'est là que j'ai grandi. Quand j'étais enfant, il m'était difficile de comprendre mes origines et quel était mon mode de vie. Mais mon oncle, John junior, m'a appris qu'il y a une raison à tout et maintenant je sais que ma raison est d'être entre deux continents et d'être un pont entre deux cultures. Mon objectif est d'aider les Européens à comprendre, grâce à l'aide des chevaux, comment ne plus être contrôlés par la puissance de leur mental. Car c'est le côté intellectuel qui les éloigne du cercle sacré de la vie. Seule la nature - animaux, arbres, plantes - nous rappellent d'où nous venons. Nous sommes tous des autochtones et les chevaux nous apprennent comment nous reconnecter avec la nature.


Les chevaux sont une passerelle vers le monde spirituel. Ils me rappellent d'où je viens et qui étaient mes ancêtres. Grâce à eux, j'apprends à être responsable et à ne pas tout ignorer autour de moi. Si je ne suis pas responsable, je détruis tout ; si je suis responsable, je fais de mon mieux pour respecter les forêts et l'eau, les sols et les animaux, et même le moindre petit brin d’herbe que je vois. Il existe un mot cheyenne : « Na mane o tets ». Il signifie « du plus profond de mon cœur je me connecte à tout ce qui est ».
